Si vous le souhaitez, vous pouvez retrouver l’introduction de notre série sur les données customer-centric ici ou lire l’épisode précédent, Créer des liens émotionnels avec les clients grâce aux données.
Pour le quatrième volet de notre série sur l’approche data-driven du marketing client, nous avons rencontré Filip von Reiche, CTO of Integrated Customer Experiences chez Wunderman Thompson, et Gaëtan Philippot, Data Scientist chez AB Tasty. Nous avons discuté des avantages et des inconvénients des vanity metrics, de leur différence avec les actionable metrics et du rôle de tous les différents indicateurs qui existent pour mesurer l’impact digital d’une marque.
Commençons par la transformation digitale. Qu’est-ce que c’est, et pourquoi les entreprises s’y intéressent-elles autant ces dernières années ?
La transformation digitale, telle que définie par Salesforce, est le processus qui consiste à utiliser les technologies digitales pour créer de nouveaux processus business, une nouvelle culture et de nouvelles expériences client – ou modifier les processus existants – afin de répondre à l’évolution des besoins des entreprises et du marché. Elle a débuté à la fin du XXe siècle et a connu une accélération rapide au cours des deux premières décennies du XXIe siècle, se propageant à travers presque tous les secteurs d’activité.
Résister à la transformation digitale est risqué. TechTarget raconte l’histoire funeste de Blockbuster LLC, une entité autrefois internationale possédant des magasins de location de vidéos aux États-Unis et dans le monde entier. Mais sa présence et sa pertinence ont décliné précipitamment à partir de 2005 environ, lorsque Netflix a exploité les technologies émergentes et a capitalisé sur l’appétit des consommateurs pour le divertissement à la demande, fourni par les services de streaming alors nouvellement disponibles.
Mais la transformation digitale peut aussi être considérée comme un mot à la mode, dit Filip, « dans le sens où les gens pensent que c’est quelque chose qu’ils doivent faire ». À l’origine, la transformation digitale a été motivée par la volonté des marques d’être plus compétitives – dans la manière dont elles gagnent des parts de marché, dans la manière dont elles sont perçues, etc. Et la transformation digitale était le moteur qui leur permettait d’atteindre ces objectifs, de réagir plus rapidement et de mesurer leur réel impact.
« Au départ, elle visait à donner aux marques une présence en ligne, et bien sûr, elle a atteint cet objectif. Mais au fil du temps, elle a acquis de nouveaux usages. Son dernier objectif est d’aider les marques à créer des expériences personnalisées en leur fournissant le bon contenu et le bon flux, ce qui leur permet d’avoir de meilleures conversations avec leurs clients, et conduit à plus de conversions. »
Pour Gaétan, « ce processus se base sur une logique de mimétisme : les gens disent “Amazon fait mille expériences par an, donc nous devons faire de même”, mais tout le monde n’a pas les vastes ressources d’Amazon, ou ne peut pas espérer les mêmes résultats. »
Mais si l’objectif est d’avoir des expériences de marque personnalisées, Amazon n’est pas un site web où les gens veulent passer beaucoup de temps. « Au contraire, les gens vont sur Amazon parce qu’ils peuvent y entrer, acheter ce qu’ils veulent et en sortir rapidement. C’est totalement impersonnel », explique Filip. « Cependant, si je passe plus de temps avec une marque, c’est parce que je veux un produit ou un service spécifique qu’elle propose, et j’attends une personnalisation de la part des marques avec lesquelles je suis engagé. »
Pour que la personnalisation soit un succès, il faut que vos perceptions soient constamment validées avant la mise en ligne d’un site web ou d’une campagne. “Plus de la moitié de toutes les campagnes que les clients réalisent à l’aide d’AB Tasty est liée à la personnalisation ou à l’expérimentation avec de la personnalisation”, remarque Gaétan. “Elles sont la base sur laquelle tout le reste est construit”.
Quelles sont les différences entre les vanity metrics et les actionable metrics ?
L’utilisation des vanity metrics varie selon les secteurs, les niveaux et les clients. La seule constante est que les vanity metrics sont très séduisantes car elles procurent ce que Filip appelle « une montée de dopamine qui illumine votre cerveau. Et dans certains cas, en fonction de ce que vous essayez d’obtenir avec votre personnalisation, cette « montée » peut être suffisante. Mais dans l’idéal, il vous faut savoir quel sera l’impact à long terme. »
Le problème est que cet impact n’est pas toujours facilement mesurable. « Prenons l’exemple de l’immobilier. Ce n’est malheureusement pas aussi simple que la cible voit un message personnalisé, la cible clique, la cible achète une maison. Ne serait-ce pas formidable ? En réalité, le laps de temps entre cette personnalisation initiale et l’achat peut être de 30, 60, 90 jours, voire plus. Dans certains cas, vous avez besoin d’une vanity metrics comme les pages aimées, les favoris, les partages, etc., comme indicateur pour vous dire où vont les choses. Mais il est toujours préférable d’avoir une mesure de conversion en arrière-plan pour vous dire ce que tout cela signifie vraiment », explique Filip.
« C’est là que des analyses plus approfondies entrent en jeu. Si vous avez un client qui est engagé mais qui ne convertit pas, vous devez découvrir quel est l’obstacle et trouver un moyen de le contourner. Si vous pouvez proposer une personnalisation qui répond aux besoins du consommateur et fait tomber cette barrière, tant mieux. Mais vous devez toujours respecter la confiance que le consommateur a placée en vous, en acceptant de vous partager ses données essentielles à votre personnalisation. Vous ne pouvez pas simplement dire « Bonjour ! Nous avons vu que vous regardiez sur notre site web !” C’est effrayant. Mais vous pouvez indiquer que vous, en tant que marque, êtes présent et à l’écoute des besoins de vos consommateurs. C’est un équilibre délicat. »
Les vanity metrics peuvent-elles être transformées en actionable metrics ?
Il convient de souligner que l’utilisation d’un indicateur « superficiel » ou d’une vanity metric est toujours justifiée lorsqu’il y a une réponse notable, qu’elle soit positive ou négative, car elle peut inciter une entreprise à creuser et analyser davantage. Pour ce faire, elle se tourne vers des actionable metrics et ainsi trouver des réponses.
Gaétan remarque : « Mais il est important de se rappeler que tout n’est pas immédiatement actionnable : parfois, le gain se fera plus tard. La valeur de chaque type d’indicateur varie selon le secteur et aussi selon la maturité du client. Par exemple, les clients e-commerce qui débutent testeront toutes sortes de choses avant de savoir quelles KPI sont les plus utiles et offrent les meilleurs résultats pour leurs activités. »
« Toute la discussion sur les indicateurs doit commencer dès que vous élaborez votre stratégie de personnalisation ou de test », ajoute Filip. « Vous aurez un objectif en tête : atteindre un certain type d’awareness ou d’engagement, ou un certain nombre de conversions, etc. Tout ce que vous testez et que vous voulez utiliser comme KPI doit s’aligner sur cet objectif. Si une vanity metric peut soutenir cet objectif, alors il est approprié. Si la conversion finale est nécessaire pour prouver une hypothèse, alors nous devons trouver comment l’obtenir. Parfois, cela peut être plus compliqué et impliquer des intégrations hors ligne, mais c’est généralement ainsi que cela fonctionne. »
Quelles questions les entreprises doivent-elles se poser pour trouver les bons indicateurs à suivre ?
Pour Filip, une question essentielle concerne la portée du projet que vous entreprenez. Mesurez-vous une campagne entière ou la décomposez-vous en plusieurs parties ? Un champ d’application étendu est plus facile à mesurer, ce qui signifie que moins de mesures sont nécessaires en général. Un champ d’application détaillé est plus complexe, car la mesure sur une base individuelle soulève des questions sur la manière de déterminer l’identité, de relier les conversions à des individus spécifiques, etc.
Mais la question la plus fondamentale est : » Dois-je tester et personnaliser mes expériences ? « . Et la réponse de Filip est « Bien sûr que oui ! Mais il existe beaucoup de chemins différents possibles pour faire ce genre de choses. L’un d’entre eux consiste à demander à une société comme Wunderman Thompson de vous aider à effectuer une analyse, en jouant le rôle de consultant pour vous montrer ce qui fonctionne et ce qui ne fonctionne pas, les points de blocage, les points à améliorer, etc.
« Mais si vous préférez faire vous-même appel aux utilisateurs, gardez en tête que du point de vue de l’expérience client, vous devez tester et découvrir la meilleure façon d’interagir avec lui. Comment pouvez-vous leur montrer que vous voulez les aider, mais sans être intrusif ? A titre de comparaison, nous pouvons prendre comme exemple l’expérience vécue en rentrant dans un magasin, en répondant à la question : « Comment voudrais-je, en tant que client, être accueilli, aidé, guidé ? ». Comprendre cela est la meilleure façon de commencer un cadre de personnalisation.”
Comment mesure-t-on la valeur vie client ?
La valeur vie client (CLV) est la marge de bénéfices qu’une entreprise s’attend à réaliser pendant toute la durée de sa relation commerciale avec un client moyen. Un article de CleverTap explique plus en détail : « Parce que la CLV est une projection financière, elle exige qu’une entreprise fasse des hypothèses éclairées. Par exemple, afin de calculer la CLV, une entreprise doit estimer la valeur moyenne du panier, le nombre moyen de transactions et la durée de la relation business avec un client donné. Les entreprises établies qui disposent de données historiques sur leurs clients peuvent calculer avec plus de précision la valeur vie client » Un peu brutal, mais c’est ainsi que cela fonctionne.
Un exemple visuel du calcul de la valeur vie client à l’aide des indicateurs de vente, de transactions et de rétention – qui peuvent tous être impactés par l’expérimentation.
Source: CleverTap
Maintenant, où trouver ces précieuses données historiques sur les clients ?
« Les CDP jouent un rôle essentiel dans la mesure de la CLV, car elles peuvent combiner des données provenant de dizaines de sources différentes pour retracer tout l’historique des interactions d’un client avec une marque, depuis ses expériences web et mobile jusqu’à ses expériences en magasin et avec le service client. Avec ces données, vous pouvez mesurer combien de temps vous avez interagi avec ce client, quelle a été l’intensité de son engagement, quelles sont les choses que vous offrez et qui l’intéressent », explique Filip.
« De toute évidence, si un consommateur fait le choix de votre marque depuis très longtemps, il s’attend à un certain niveau de personnalisation de votre part. Il va s’attendre à l’accolade chaleureuse et à la conversation amicale que vous avez généralement avec une personne que vous connaissez depuis des années, et pas seulement à un bonjour rapide et à une conversation de courtoisie, que vous offrez à une personne que vous venez de rencontrer. La personnalisation mérite qu’on s’y attarde, car mieux vous connaissez vos clients, plus longtemps vous pouvez poursuivre votre conversation avec eux. Ceci se traduit par de la fidélité et de la rétention et, espérons-le, par des recommandations. »
Il existe des techniques pour maximiser la CLV, notamment la segmentation, la personnalisation, la diversification des points de contact, du cross-selling et du up-selling, pour n’en citer que quelques-unes.
Dans l’économie actuelle, où les marchés sont encombrés de concurrents qui se disputent les mêmes clients, l’engagement et la conversion sont essentiels au succès de toute entreprise.
Vous voulez en savoir plus sur les données ? Rendez-vous ici pour le cinquième volet de notre série sur les données customer-centric !